Les origines

 

Le nom Oradour vient du mot latin oratorium qui indique un lieu de prière pour les morts. Oradour se dit en langue Limousine Ouradou, il correspond à l’endroit où l’on prie. Deux interprétations sont proposées quant à l’origine du nom, la dénomination d’Oradour, l’origine du lieu, viendrait soit d’une chapelle privée édifiée sur le domaine d’un riche particulier, soit d’une chapelle rudimentaire. Souvent ces chapelles remplaçaient des monuments païens qui se trouvaient toujours au point de jonction des voies romaines. Les monuments avaient un rôle funéraire. En Limousin beaucoup de localités portent le nom Oradour : Oradour-sur-Glane, Oradour-Saint-Genest, Oradour-sur-Vayres. Une lanterne aux morts est présente dans le cimetière d’Oradour-sur-Glane et à Oradour-Saint-Genest.

 

Le plus vieux vestige trouvé à proximité du bourg est un morceau de souterrain, découvert par un paysan lors des labours, par l’effondrement du sol sous le poids d’un bœuf, entre 1920 et 1925. C’est un souterrain qui servait aux Lemovices, Gaulois limousins, de refuge pour échapper aux pillages, aux massacres et aux brigands.

 

 

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Lanterne aux morts

dans le cimetière

 

Au Moyen Age

 

Au Xe siècle, les châteaux forts, les églises, les chapelles de prieurés remplissent la campagne. Malgré les défrichements, le Limousin reste un pays de bois. La paroisse d’Oradour-sur-Glane s’appelle Oratorio supra Glanam.

 

La plus vieille partie de l’église date du XIIe siècle : le chœur. La lanterne des morts, monument essentiellement de la région limousine et de ses environs, date également du XIIe siècle. Elle a été construite dans le cimetière à la sortie d’Oradour en direction de Limoges. Lors d’évènements funéraires une lampe à huile était disposée au sommet de la lanterne et brûlait toute la nuit. La dalle servait d’autel.

 

De 1361 à 1421, Oradour se retrouve dans une zone occupée par les Anglais. Redevenu français, le village se trouve à la frontière du Poitou et du Limousin. Une zone d’Oradour est alors régie sous le droit coutumier (Poitou) et une seconde sous le droit écrit (Limousin). Les habitants étaient devenus poitevins sous la loi, mais restés limousins dans les mœurs et les esprits.

 

Au XVe siècle, après la guerre de cent ans, la nef et les chapelles latérales de l’église sont construites.

 

Au XVIe siècle

 

On parle de seigneurie d’Oradour. Avec la « Réforme », on devient protestants, mais en 1685, il y aura le retour au catholicisme juste avant la révocation de l’Edit de Nantes.

 

En 1563, on relève les premières foires à Oradour. Celles-ci sont un puissant moyen d’échange et un moyen fort de revenus pour le seigneur du lieu qui en a la charge. Le droit de foire est accordé par le roi, il est cher en présents au souverain. A Oradour, il y a alors 4 foires par ans et un marché tous les lundi. Plus tard les foires deviennent mensuelles. Une halle ouverte est construite, le seigneur devant la fournir. Pendant ces évènements d’échanges, les commerçants d’Oradour sont tenus de fermer leur boutique, et d’apporter la marchandise sous la halle, sous peine d’amende. Le seigneur bénéficie pleinement des foires, de par les taxes. Ces privilèges lui seront enlevés à la Révolution ; il n’aura alors que la propriété des bâtiments qu’il avait construit.

 

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Dans ce siècle, pendant les guerres de religion, les églises deviennent de véritables places fortes. L’église d’Oradour est fortifiée. Le clocher est carré, d’un type caractéristique de l’architecture militaire, ses contreforts sont massifs et surmontés de tourelles, véritables échauguettes.

 

 

XVIIe – XVIIIe siècles

 

Fin XVIIe, Oradour devait être une localité importante avec ses foires et ses marchés. Pour les années 1688-89 on compte 286 feux.

 

L’emplacement du vieux cimetière dérange le seigneur. Un échange de terrain est proposée et s’opère. Le vieux cimetière est déménagé à l’endroit actuel. La lanterne aux morts est déplacée, mais les maçons ne sauront pas la remonter à l’identique. Le 23 juillet 1773, on interdit l’usage de l’ancien cimetière. Toucher aux tombes provoque des agitations dans la population. Cela devient une affaire litigieuse qui va s’étaler sur quatre années.

 

 

Autour de la Révolution

 

Le rapport du curé d’Oradour, rapporte les données suivantes en 1785 :

- On compte 246  feux et 1747 habitants sur Oradour (campagne et bourg)

- Les exploitations et voiturages se font avec des bœufs et des vaches.

- Le pays est un sable maigre, marécageux. Les terres ont peu de substance. Il y a beaucoup de prairies et pâturages.

- On recueille du chanvre en petite quantité.

- Quelques troupeaux de brebis, mais au maigre produit.

- Les étoffes et toiles ne sont fabriquées que pour l’usage des habitants.

- Il y a une petite papeterie (moulin à papier)

- Les 13 foires par an seraient très fréquentées si les communications étaient plus commodes

- Il n’y a pas de maison religieuse, hôpitaux, école de charité, poste.

- Les chemins de bourg à bourg, de village à village, sont en très mauvais état et presque impraticables pendant l’hiver durant cinq mois.

 

- Il faut reconstruire le pont flottant sur la Glane au bas du bourg.

 

 

En 1787, le village n’est plus régi par le seigneur mais par la première municipalité qui est formée.

 

En 1789, les taxes sont remplacées en :

1. Contributions foncières, perçues sur les terrains et maisons

2. Contributions personnelles et mobilières, calculées sur la fortune des individus en tenant compte du loyer.

3. Patente, perçue sur les commerçants et industriels.

 

Dans le décret du 22 décembre 1789, le Royaume est divisé en départements, districts, cantons et communes. L’année suivante Oradour (à moitié compris dans l’enclave poitevine pendant cinq siècles) est détaché du Poitou et incorporé dans le département de la Haute-Vienne.

 

La municipalité est élue en 1790. D’après la loi elle doit comprendre, un maire, un procureur syndic (pour les affaires de la commune) et un corps municipal. Ce dernier doit comprendre 2 membres pour une population jusqu’à 500 personnes, 3 membres pour une population de 500 à 300 personnes, cas d’Oradour. Le conseil général ayant deux fois plus de membres, est formé de notables, citoyens les plus imposés.

 

 

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Cheminée dans le moulin,

 provenant sans doute du château

 On note l’existence d’un bureau de « tabac » en 1790-92, avec un petit stock de tabac. En 1793, les murs des constructions sont lessivés afin de récolter du salpêtre, objet de réquisition par la loi du 4 décembre 1793, pour la production de poudre pour la nation. En cette même année, le château des De Lescours, situé au sud de l’église et du presbytère, est démoli. Tout disparaît, tout est emporté, si bien que les générations qui suivent ne connaissent pas de ruine. Les biens du seigneur sont vendus à 31 acheteurs de la commune. Des familles aisées font l’acquisition d’immeuble dans le bourg. Les métairies importantes sont vendes en plusieurs lots.

 

La population est de 1256 habitants en 1794. En cette année il y a pénurie de blé, on encourage et aide les moulins dont les trois d’Oradour.

 

 

Au XIXe siècle

 

1191 habitants sont comptés pour l’année 1800. Les travaux urgents sont entrepris en 1817, il faut réparer le pont sur la Glane qui menace ruine. Les pierres du château servent à faire les talus des rives. Le pont est doté de deux arcades en bois au lieu d’une voûte en pierre. On peut alors situer à cette période le tracé de la rue principale du bas du bourg. Avant le pont, on descendait le long des maisons Mercier, Senon, pour rejoindre par un chemin le moulin. Le tracé de la voie de communication a été décalé. L’ancien tracé est visible sur le cadastre ci contre à gauche, qui est le plus vieux plan archivé d’Oradour (Archives Départementales de la Haute-Vienne).

 

 

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Cadastre du village

au début du XIXème siècle

 

Sur ce cadastre l’essentiel des constructions se trouvent concentrées dans le bourg, quelques fermes sont à l’écart. Attention, sur ce cadastre ce qui est poché en bleu ne correspond pas toujours aux bâtisses. L’église est repérée du numéro 120, peu lisible. Au sud, se trouve l’emplacement du château démoli en 1793.

 

La muraille qui retient la place de l’église (plus haute que la rue) est refaite en 1820, elle menaçait de s’écrouler. En même temps le pavé de la rue principale est réparé. La halle est restaurée. Les revenus des foires et des marchés sont très bénéfiques pour la commune. Les communes voisines envies cette position car elles n’ont pas de foire. Le pont en bois est achevé en 1823. On compte alors 300 habitants dans le bourg. Le besoin d’une école est ressenti en 1830. Le nombre d’habitants dans la commune d’Oradour augmente années après années : 1591habitants en 1830, 1740 en 1842, 1989 en 1846.

 

L’église est en réparation en 1838 : rejointements à la voûte, dalles de pavage, crépissage, vitraux, couverture et consolidation de la charpente du clocher. Le Champ de Foire est agrandi par l’achat de parcelles, les foires sont très importantes.

 

Le pont en bois vieillit mal, il est signalé par la commune, en 1842, comme « hors service ».

 

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L’avènement de la  « République » est accueilli avec joie par la population en 1848, l’arbre près de la halle (existant encore aujourd’hui) est planté : « Chêne de la Liberté ». L’année suivante le pont sur la Glane s’écroule, il est reconstruit en pierre. Si la commune d’Oradour comporte 1952 près de 2000 habitants en 1860, elle n’est toujours pas équipée d’un bureau de poste.

 

De nouvelles réparations, importantes, ont lieu sur l’église de 1860 à 1864 :

« Le devis envisage la réfection du sommet et du mur de chevet, l’élévation du couronnement des murs de la nef afin que les fermes de la toiture ne s’appuient pas sur la voûte ; le démontage et le remontage de la toiture de la nef, la couverture en tuiles creuses (600 tuiles), la réfection du pavé au moyen de dalles en granit provenant des carrières du Repaire, une toiture en ardoise pour le clocher et des clochetons remplaçant la toiture en bardeaux ; des vitraux en verre de couleur avec maillage en plomb et protection extérieure par un treillis de fil de fer zingué ; la fourniture d’un confessionnal en chêne, haut de deux mètres, de stalles de chêne ; le remplacement d’une partie de la charpente, etc... »

 

Depuis trente ans la municipalité louait une maison pour l’école, elle n’était pas en mesure d’en acheter une. L’achat est fait le 18 mai 1862, d’une maison, pour y installer mairie et école (une classe mixte).

 

En 1884, le clocher reçoit deux cloches (elles fonderont dans l’incendie du 10 juin 1944)

En 1889, des aménagements ont lieu au cimetière : allée centrale, murs de clôture, portail en chêne, etc.).

 

La commune d'Oradour dépasse 2000 habitants en 1891 (2045 hab.)

 

Jusqu’en 1944

 

Le XXe siècle est une période où les documents sont plus nombreux en ce qui concerne Oradour. Il y a les premières cartes postales, et les photos conservées à l’extérieur du bourg. Aussi quelques témoins de ce temps ont pu livrer leur récits, et témoigner de la vie à Oradour jusqu’au 10 juin 1944. Tous ces témoignages nous racontent la vie, mais aussi l’ambiance du bourg qu’on pouvait trouver à Oradour.

 

La halle est refaite pour la dernière fois en 1903.

 

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L’arrivée du tramway en 1912 à Oradour transforme la vie du village. Il y a beaucoup plus d’échanges avec les grandes villes. On n’est plus qu’à 1h15 de Limoges. Le tramway apporte l’électrification du bourg, puis celle de la campagne. Le pont est modifié. L’inauguration de la ligne a lieu le 17 août 1911.

 

Dans la Haute-Vienne un important réseau est dressé, établi par les Ponts et Chaussées. Voir le plan du réseau des Chemins de fer de la Haute-Vienne en annexe. Oradour a le bonheur d’être traversé par une ligne de tramway, situé entre deux villes importantes : Limoges et Saint-Junien. L’électricité est vendue par la compagnie des Chemins de Fer de la Haute-Vienne. La gare des tramways est installée au nord du village, elle comprend deux bâtiments : le premier est destiné aux voyageurs, le second est une halle à marchandises. La ligne qui traverse le bourg est composée d’une seule voie métrique. Les tramways se croisent au niveau de la gare par un dédoublement de la voie.

 

La première guerre mondiale est une saignée dans la population d’Oradour. La plaque dédiée aux morts de la guerre 1941-18, encore visible dans l’église, liste 97 victimes.

 

Depuis les années 1920, l’agriculture subit une crise économique aggravée par l’exiguïté des exploitations et la médiocrité des sols. La traction se fait essentiellement par des bœufs. L’élevage domine. Les cultures vivrières assurent l’autosuffisance des familles sur les exploitations. Les animaux de basse cour sont l’activité et les revenus des femmes.

 

 

 

Un préau est ajouté à l’école des garçons située près de la gare. L’école des garçons est accolée à la mairie. Dans le même secteur, la poste est construite en 1927. C’est un bâtiment fortement orné de modénatures en façade, comparé aux constructions du bourg. Sa couverture est faite d’ardoises, ce qui est peu courant dans le bourg, la tuile étant plutôt de rigueur.

 

Dans les années 1930, l’activité musicale est intense à Oradour. Les concerts, les représentations théâtrales, les bals et autres réjouissances animées par les sociétés musicales, se multiplient et rythme la vie des Radounauds (nom des habitants d’Oradour). En 1937, l’éclairage public est installé.

 

Les frairies d’Oradour sont célèbres, ce sont des fêtes qui ont lieu deux fois par an, animées par la retraite aux flambeaux, la fanfare, la course cycliste, une journée des commerçants et des bals. Elles s’étalent sur tout un week-end. Elles attirent beaucoup de monde et sont très attendus des enfants gourmands d’attractions foraines. La frairie prévue pour les 27-28 août 1939 est annulée du fait de l’entrée en guerre. En dehors des frairies régulières, l’activité de pêche sur la Glane est importante. Il faut dire que cette rivière s’est taillée une réputation de rivière poissonneuse. Deux fois par an, la société de pêche d’Oradour organise des concours qui se terminent souvent dans les restaurants du bourg.

 

Oradour-sur-Glane, comme beaucoup de paroisses limousines, a une population catholique peu pratiquante. Mais elle sait demander les services de l’église pour les grands évènements : baptêmes, communions, mariages.

 

Les activités à Oradour en 1944

 

Le bourg d’Oradour regroupe tous les services publiques d’un village ordinaire :

- 1 mairie,

- 4 écoles, école enfantine, école des garçons, école des filles, école des Lorrains,

- 1 poste, quatre employés dont deux facteurs

- 1 gare du chemin de fer départemental

- 1 recette buraliste

 

Les activités y sont nombreuses :

 

- 5 coiffeurs

- 3 cordonniers

- 3 hôtels-restaurants

- 3 épiceries

- 1 feuillardier

- 5 menuisiers

- 5 cafés

- 1 carrier-puisatier

- 1 sabotier

- 3 couturières

- 2 boulangeries

- 2 boucheries

- 1 boucherie - charcuterie

- 1 mercerie

- 2 quincailleries

- 1 plombier-zingueur

- 1 garage

- 1 tailleur

- 2 marchands de vin

- 1 agent d’affaires

- 3 marchands de tissus

- 1 maçon

- 3 auberges

- 2 charrons

- 1 monteur-électricien

- 1 marchand de laine, filateur

- 1 maréchal ferrant – forgeron

- 1 cidrerie

- 1 pâtisserie

- 1 forgeron

- 1 marchand de bois

 

Certaines des activités citées ci-dessus sont réunies en un même lieu. Il n’est pas surprenant d’avoir par exemple un café coiffeur ou une auberge cimenterie.

 

Jusqu’en 1944 des cartes postales ont été éditées et envoyées depuis Oradour. Le nom de l’éditeur était en fait le nom du vendeur, on retrouve alors sur les cartes les noms Desourteaux, Mercier, Beau, noms de commerçants d’Oradour.